dimanche 30 octobre 2011

7 FILMS POUR UN HALLOWEEN QUEER


"La tradition, ça a du bon !...", clamait une vieille pub pour je ne sais plus quel fromage. Je vous propose donc ma traditionnelle sélection annuelle de 7 films à (re)découvrir, en vue d'un Halloween très
gay-frightly...

HOUSE OF HORRORS (Jean YARBROUGH, 1946)


Ce petit film Universal assez méconnu chez nous est un exemple typique de la queer horror telle que la firme la pratiquait régulièrement, aussi bien dans ses productions de prestige (La Fiancée de Frankenstein), que dans des bandes plus modestes (La Fille de Dracula, Le Chat noir, Le Corbeau). Comme de coutume, les figures homosexuelles sont représentées par deux catégories de personnages marginaux : l'artiste incompris et le "monstre". La relation "crypto-gay" concerne ici le sculpteur déchard Marcel De Lange (Martin KOSLECK) et un meurtrier au physique repoussant connu sous le nom du "Creeper" (l'acromégalique Rondo HATTON). Alors que le premier s'apprête à se suicider en se jetant dans un fleuve, il en voit émerger le second qu'il sauve de la noyade. Il décide de l'héberger dans son atelier et d'en faire le modèle de sa prochaine œuvre : un buste exprimant toute la laideur et la brutalité tapies dans l'âme humaine. Touché par la sollicitude de son protecteur, le "Creeper" se charge d'éliminer, en leur brisant l'échine, les critiques acharnés à ternir la réputation de De Lange.
Le scénario développe le schéma classique de la relation amicalo-amoureuse entre deux parias solidaires dans leur haine de la société bourgeoise, dont ils se vengent par le crime (le cas de figure le plus connu est le duo formé par Ygor et le monstre de Frankenstein dans Le Fils de Frankenstein -- le docteur Vollin et le meurtrier Bateman du Corbeau en sont une variation, de même que le criminologue Edmond Bancroft et son jeune assistant dans Crimes au musée des horreurs). Quant au thème de la vengeance d'un artiste queer, il annonce la geste meurtrière de Vincent PRICE dans des classiques comme L'Homme au masque de cire, L'Abominable Dr. Phibes, et Théâtre de sang. Le fait que De Lange soit interprété par un comédien notoirement gay ajoute du piment à la chose : Martin KOSLECK, spécialiste des rôles de nazis et figure familière du fantastique, apporte au personnage une ambiguïté facilitant son décryptage, particulièrement dans les scènes où il s'extasie sur l'aspect physique de HATTON, ou lorsqu'il le confronte à l'héroïne, comme on présente un amant caché pour doucher les ardeurs d'une amie trop entreprenante.


Rondo HATTON

Avec une belle absence de scrupules, la Universal misait beaucoup sur les difformités naturelles de HATTON pour relancer son cycle de films d'épouvante. Révélé en tant que "Creeper" dans un film de la série Sherlock Holmes, La Perle des Borgia, le comédien devait mourir quelques mois plus tard des suites de sa maladie, après avoir incarné une dernière fois le personnage dans The Brute Man du même Jean YARBROUGH, sorte de préquelle à House of Horrors.

LES CROCS DE SATAN (Cry of the Banshee, Gordon HESSLER, 1970)


Malgré la citation de quelques vers de POE au générique, Cry of the Banshee ne se présente pas comme une adaptation supplémentaire de l'auteur du "Corbeau" par l'A.I.P., mais louche plutôt du côté du Grand Inquisiteur, en offrant à Vincent Price un nouveau rôle de chasseur de sorcières immoral et inflexible. Contrairement au Matthew Hopkins du film de REEVES, qui profitait de sa fonction pour assouvir ses pulsions sadiques et sa vénalité, Lord Edward Whithman (PRICE) est convaincu d'agir pour la cause du Bien et croit dur comme fer au pouvoir de la sorcellerie. Traquant les membres d'un culte païen, il écope d'une malédiction lancée par la grande prêtresse Oona (l'ancienne star du cinéma allemand Elisabeth BERGNER, dans un comeback singulièrement peu probant). L'un de ses domestiques se transforme en loup-garou et massacre sa famille lors de furieux assauts filmés à grand renfort de lentilles déformantes.



Le scénariste Christopher WICKING confond allègrement paganisme et sorcellerie, et donne au "sidhe" (créature de la mythologie celtique) dont il est question dans le script, l'apparence d'un loup-garou. Les prétentions historiques du film en prennent un sacré coup, et l'on sent chez Gordon HESSLER un certain embarras à donner une vague unité à un matériau des plus disparates. Il s'en tire en insufflant aux moments-clés de l'intrigue un certain lyrisme, qui tend néanmoins à verser à plusieurs reprises dans l'opérette à grand spectacle (voir les scènes de sabbat, où une dizaine de figurants s'épuisent en gesticulations choréiques assez croquignolettes).
Pour Vincent PRICE, lassé de paraître dans des productions de plus en plus négligées, le film fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase et l'incita à demander à son agent de résilier son contrat d'exclusivité avec l'A.I.P. Lors d'une party organisée sur le tournage pour fêter son soi-disant 100ème film, il donna libre cours à son irritation envers le producteur Samuel Z. ARKOFF, à qui il lança, au moment où ce dernier allait couper le gâteau d'anniversaire : "Prenez donc le couteau que vous m'avez planté le dos !"
Pour info : si les illustrations agrémentant le générique vous semblent avoir un petit côté Monty Python, c'est tout bonnement parce qu'elles sont l'œuvre de Terry GILLIAM...

Hadopisable sur SMORGASBLOG...

Extrait : Qui voudrait croire que la délicieuse Quinn O'HARA puisse être une sorcière ?...



A REFLECTION OF FEAR (William A. FRAKER, 1971/73)


Le chef-d'œuvre de cette sélection. A Reflection of Fear reste désespérément ignoré en France (et pour cause : il n'y fut distribué ni en salles ni en vidéo), et à peine plus connu aux Etats-Unis et dans son pays d'origine (le Canada), tout en ayant inspiré pas mal de bandes postérieures à sa réalisation (pour n'en citer que deux : Sleepaway Camp et Unhinged). Atypique, dérangeant, ultra-queer, ce premier film du grand chef-opérateur William A. FRAKER (Rosemary's Baby ; Le Diable à trois ; Bullitt) a tout pour être considéré comme un classique de la gay horror. Tout, sauf un écho suffisant...


Sondra LOCKE y est Marguerite, une jeune fille élevée dans une totale réclusion par sa mère et sa grand-mère, dans une vaste demeure surplombant l'océan. Son seul ami est une poupée baptisée Aaron, avec qui elle entretient d'étranges discussions. Son père, Michael (Robert SHAW), qui ne l'a jamais vue, ressurgit un beau jour en compagnie de sa nouvelle fiancée, Anne (Sally KELLERMAN), afin de demander le divorce à son épouse. Le soir même de sa visite, la mère et la grand-mère de l'adolescente sont brutalement assassinées. Michael décide de séjourner dans la maison le temps de l'enquête ; bien que réalisant combien Marguerite est perturbée, il ne peut se défendre de s'abandonner à l'affection démesurée qu'elle lui témoigne, à la grande inquiétude d'Anne.



Remisé durant deux ans dans les tiroirs des producteurs, qui ne savaient comment vendre un produit aussi singulier, A Reflection of Fear mérite d'être considéré comme un spécimen majeur du fantastique psychologique, dans la lignée de Répulsion ou de Ne vous retournez pas. Tout concourt à sa réussite : raffinement de la mise en scène, qualité de l'interprétation (LOCKE, totalement habitée par son personnage, est absolument remarquable), et surtout scénario profondément audacieux, dont on ne peut évoquer les subtilités sans ruiner les surprises qu'il réserve. Il devient dès lors particulièrement périlleux de proposer une analyse de son contenu queer, ce à quoi je renonce pour le moment (une étude détaillée s'impose, que je tenterai peut-être un jour ou l'autre) ; il me suffit de dire qu'il est d'une hardiesse et d'une pertinence rarement vues dans la production fantastique de l'époque.
En un mot comme en cent : une œuvre à découvrir d'urgence, malheureusement inaccessible en Zone 2, mais hadopisable (en V.O. et copie impeccable) chez notre précieuse amie la grenouille.

La bande-annonce :



SILENT NIGHT, BLOODY NIGHT (Theodore GERSHUNY, 1974)


Les fantasticophiles ont longtemps désigné le Black Christmas de Bob CLARK comme étant l'initiateur du slasher, et l'inspirateur supposé de La Nuit des masques. Il y a quelques années, les multiples sorties en DVD Zone 1 de Silent Night, Bloody Night (tombé dans le domaine public), et sa redécouverte après une longue invisibilité, ont remis ce statut en cause. Avec ses effets de caméra subjective, son mystérieux tueur échappé d'une maison de fous, ses meurtres sauvages et imprévisibles, et son petit jeu des coups de fil anonymes passés aux futures victimes, le film de Theodore GERSHUNY, conçu quelques mois avant celui de CLARK, s'affirme bel et bien comme le précurseur véritable du sous-genre, tout en entretenant des liens étroits avec le giallo. Ces considérations historiques mises à part, il est à coup sûr l'un des films d'horreur américains les plus singuliers des années 70, à la fois ambitieux, confus, et surprenant.
En 1950, la veille de Noël, le fortuné Wilfred Butler jaillit hors de chez lui, le corps dévoré par les flammes. Le coroner conclue à un accident domestique, au grand soulagement des notables de la ville. Butler lègue sa demeure à son petit-fils Jeffrey (John PATTERSON), sous la condition qu'elle restera inhabitée et ne subira aucune rénovation. Vingt ans plus tard, l'héritier dépêche son notaire, John Carter (Patrick O'Neal), auprès des conseillers municipaux, afin de leur proposer d'acheter la propriété. Parallèlement, un dément s'échappe d'un asile voisin, et les différentes personnes impliquées dans la tractation ou liées au passé de la maison sont décimées de sanglante façon. Jeffrey tente de résoudre le mystère avec l'aide de la fille du maire, Diane Adams (Mary WORONOV).


Un modèle de jaquette mensongère...

Impossible d'en raconter davantage sans déflorer une intrigue truffée de retournements de situations et de révélations sordides, au nombre desquelles on relève le viol d'une fillette de 15 ans, un cas d'inceste, et un gueuleton de réveillon suivi d'un massacre dans un asile psychiatrique. Ce dernier élément donne lieu à la scène la plus marquante du film : lors d'un hallucinant flash-back en sépia, GERSHUNY restitue de façon stupéfiante l'esthétique expressionniste des films des années 1910, nous donnant l'impression de visionner une bande tournée à l'aube du cinéma. Une séquence digne des expérimentateurs de l'underground new-yorkais, qui inspirèrent sans doute le cinéaste puisqu'il fait appel à quelques grandes figures de la Factory d'Andy WARHOL, dont la présence donne au film un caractère queer prononcé. Outre Mary WORONOV, qui fit ses débuts d'actrice en tant que "superstar" warholienne, on croise aussi Ondine et Candy DARLING, célèbre transsexuel et muse du Velvet Underground, qui inspira à Lou REED son fameux "Walk on the Wild Side", et dont la photo sur son lit de mort servit de couverture à l'album "I Am a Bird Now" d'Antony and the Johnsons.
Sans avoir l'étoffe d'un classique méconnu, Silent Night, Bloody Night s'impose comme une œuvre atypique qui, en dépit de son scénario embrouillé (ou peut-être grâce à lui), distille une réelle étrangeté et s'inscrit durablement dans la mémoire des spectateurs.

La bande-annonce :



Pour hadopiser le film (en V.O.S.T.) et découvrir le point de vue Throma, rendez-vous sur l'indispensable blog VIDEO PARTY MASSACRE !

DEATH AT LOVE HOUSE (E.W. SWACKHAMER, 1976) Téléfilm


Voilà un titre qui aurait sans doute plu aux surréalistes : La Mort dans la maison de l'amour ! Pourtant, ne vous y trompez pas : la "maison de l'amour" en question n'a rien d'un lupanar, et doit son nom à sa propriétaire, la légendaire autant qu'imaginaire star hollywoodienne des années 30, Lorna Love, décédée dans des circonstances mystérieuses. Rien à voir non plus avec le fait qu'une autre LAMOUR, prénommée Dorothy, fait partie du casting très has-beenophile de cet excellent téléfilm (où l'on croise également John CARRADINE, Joan BLONDELL et Sylvia Sydney), d'autant que la fille au sarong y joue une rivale de Lorna Love ne gardant d'elle que des souvenirs déplaisants. Pour compliquer les choses, la somptueuse villa appartenait en réalité à Harold LLOYD, et devait fournir le décor, quatorze ans plus tard, de l'asile d'aliénés du délectable Delirium.
Mêlant quelques thèmes de Laura et du Démon des femmes à l'ambiance de Boulevard du crépuscule, Death at Love House s'intéresse aux investigations d'un couple d'écrivains (Kate JACKSON et Robert WAGNER) qui souhaitent rédiger une biographie de la star. Ils s'installent dans sa demeure sous l'œil inamical de Sylvia SYDNEY, fidèle gouvernante de la défunte et gardienne de ses secrets (vous avez dit Rebecca ?) Des bouquins pas catholiques découverts dans la bibliothèque de Lorna (le "Malleus Maleficorum" et... "Les Fleurs du Mal" !), ainsi que les témoignages de ses proches, ne tardent pas à convaincre nos deux plumitifs qu'elle s'adonnait à la magie noire. Il se trouve en outre que le père de WAGNER fut l'un des innombrables amants de Lorna ; artiste peintre, il réalisa d'elle un portrait merveilleusement croutesque qui exerce rapidement une inquiétante fascination sur son fils.


Ce sujet idéal pour Curtis HARRINGTON est traité avec classicisme et efficacité par le téléaste E.W. SWACKHAMER (futur signataire d'un mémorable Vampire avec Richard LYNCH), qui ne lésine ni sur les poncifs gothiques (orage, "dame blanche" errant dans le parc de la villa, gouvernante revêche, grimoires malsains), ni sur la nostalgie propre aux évocations du vieil Hollywood (la révélation finale propose une alternative délirante aux problèmes des stars déchues à la Baby Jane ou Norma Desmond). Dans les flashbacks où elle apparaît, Lorna Love promène un look eighties de chaudasse peroxydée plus proche de Morgan FAIRCHILD que de Jean HARLOW ; le rouge à lèvres criard arboré par Sylvia SYDNEY lui donne l'air d'un photophore humain ; John CARRADINE, en cinéaste-pygmalion dont la carrière fut brisée par les manigances de Lorna, clame son ressentiment sous un fracas de tonnerre et d'éclairs ; quant à Dorothy LAMOUR et Joan BLONDELL, elles apportent à leurs cameos davantage d'embonpoint que d'épaisseur psychologique.


A noter une jolie scène où Robert WAGNER, regardant un vieux film de Lorna, voit celle-ci s'adresser à lui depuis l'écran. Le finale, aussi grandiloquent qu'invraisemblable, est un grand moment de camp pur...
Pas du nanar, du nanan !...

Hadopisable en V.O. chez notre amie la grenouille, ou visible en intégralité sur YouTube.

CRAZED (Blood Shed / Slipping into Darkness, Richard CASSIDY, 1982)


En un temps où l'Imdb n'existait pas, il me fut assez difficile d'identifier cette obscure production sortie à la sauvette en vidéo sous le label Carrère. La réalisation anonyme, l'interprétation et la musique routinières, l'apparentaient fortement à un téléfilm, mais la noirceur du propos et la (relative) violence de certaines scènes cadraient mal avec les impératifs moraux du petit écran.
Karen (Beverly ROSS), une jeune femme dépressive et épileptique, quitte son mari pour s'adonner à l'écriture en toute quiétude. Elle loue une chambre chez Mme Brower (Belle MITCHELL), une vieille veuve à demi paralytique et sénile, et fait la connaissance de Graham, (Laszlo PAPAS) son voisin, un garçon solitaire, timide et impuissant, qui a la fâcheuse manie de l'épier à travers les grilles d'aération et les glaces sans tain de la salle de bain. Victime d'une crise d'épilepsie, Karen se noie dans sa baignoire sous les yeux de Graham, qui récupère alors le cadavre et le conserve jalousement dans son appartement.


Ce qui étonne dans cette œuvrette, c'est le ton résolument neutre adopté par le metteur en scène, son approche quasi documentaire d'un cas de névrose rendu presque banal par le traitement scénaristique. Pas d'épate, peu de sang, mais une violence contenue, et une troublante application à dépeindre la médiocrité d'un quotidien rendu sordide à force de routine.
Le personnage de la vieille logeuse apathique et geignarde, les propriétaires de l'hôtel dans lequel Graham effectue le service de nuit, le professeur de littérature dictatorial et aigri, et jusqu'au personnage de Karen, neurasthénique et indécise, sont autant de portraits plutôt réussis de l'aliénation et de la bêtise ordinaires. La sauvagerie en moins, c'est un peu le propos de Henry, Portrait of a Serial Killer que Richard CASSIDY livre ici, avec quelques années d'avance.
On notera l'influence des thrillers gériatriques post-Baby Jane dans le choix du décor et dans le portrait de Mme Brewer, vieille dame assommante et baveuse, qu'une indécrottable curiosité vouera à un sort déplaisant. Le rôle est merveilleusement campé par Belle MITCHELL, une habituée du fantastique entrevue dans Le Fantôme de l'Opéra (version LUBIN), La Bête aux cinq doigts, et Soleil vert.

Hadopisable prochainement sur SMORGASBLOG...

THE HORROR STAR (aka FRIGHTMARE) (Norman Thaddeus VANE, 1983)


Conrad RAGZOFF (Ferdy MAYNE), ancienne star du cinéma d'épouvante, cachetonne dans des spots publicitaires pour tromper l'inactivité. Sur le tournage de l'un d'eux, il n'hésite pas à assassiner un réalisateur qui lui a manqué de respect. Lors d'une rétrospective de ses films organisée par les élèves d'une université, il est victime d'une crise cardiaque et décède quelques heures plus tard. Un groupe de fans indélicats a l'idée de voler son cadavre dans le somptueux mausolée où il repose, et d'en faire le convive d'une party improvisée. Comme de bien entendu, le mort ne tarde pas à recouvrer de la vigueur suite à une séance de spiritisme initiée par sa veuve. Son premier soin est de se venger des morveux ayant eu l'impudence de profaner son sommeil.
Pour un spectateur contemporain, cette réjouissante série B s'avère doublement nostalgique : d'abord par l'hommage qu'elle rend à un cinéma gothique alors tombé en désuétude, ensuite par son cachet typiquement eighties qui ne peut manquer de séduire ceux qui avaient 15 ans à l'époque de sa sortie. J'en avais 13 lorsque je la découvris en vidéo, et la fanatique de fantastique old school que j'étais (et demeure) en fit d'emblée l'un de ses films de chevet. Le personnage de Conrad Ragzoff devint pour moi une telle obsession que je me lançai dans la rédaction de sa monographie imaginaire, sur le modèle des volumes consacrés aux stars de l'horreur par Citadell Press. Fiches techniques et résumés de scripts à l'appui, je gratifiai le comédien d'une filmographie où se rencontraient des titres aussi alléchants que Dracula, a New Terror (David SPENCER, 1933), The Mysterious Doctor Markham (Meurtres à l'opéra, Arnold SYLVESTER, 1936), le très audacieux Horrors of Dr. Heckel (Michael MARL, 1945), que je qualifiai judicieusement de "monument de sadisme et de cruauté", ou le mythique Les Horreurs de Commode (1977), péplum horrifique et porno de six heures trente (!) anticipant le Caligula de Tinto BRASS, et réalisé par RAGZOFF lui-même à l'âge de 73 ans (!!).


On le voit, The Horror Star eut un sérieux impact sur mon imaginaire, que ne justifient pas, à vrai dire, ses qualités intrinsèques, même si la bande reste très sympathique à presque trente ans de distance. La grande idée des auteurs était de rénover le slasher en y intégrant des éléments et une atmosphère rétros empruntés à Roger CORMAN et aux films de l'Universal, dont le succès à la télévision ne se démentait pas. Retour au gothique, donc, avec remplacement du traditionnel boogeyman anonyme et décervelé par une star de l'horreur évoquant fortement LUGOSI, Vincent PRICE ou Christopher LEE. Pour camper cet imposant personnage, les producteurs eurent l'idée épatante de faire appel à Ferdy MAYNE, qui n'eut jamais l'occasion de s'imposer dans le genre autrement que dans le registre de la parodie (il fut le Comte von Krolock du Bal de Vampires et un Dracula d'opérette dans The Vampire Happening et dans l'excellente mini-série La Tante de Frankenstein). Il nous démontre ici, une fois de plus, que le cinéma fantastique s'est privé d'un interprète emblématique en ne lui accordant pas une attention suffisante.
On notera également la présence, dans la bande des jeunes malotrus, de ce cher Jeffrey COMBS, dont je n'aurai pas l'impudence de vous rappeler les hauts faits.
Malgré de fâcheuses invraisemblances scénaristiques et une photographie hésitant entre l'éclairage d'un puits de mine et la flamboyance d'un soap opera des fifties, The Horror Star se doit d'être vu par tout amateur d'horreur à l'ancienne, qu'il soit nostalgique de l'Age d'Or ou de nos plus récentes années 80.

Hadopisable sur SMORGASBLOG...